JEAN AUDOUZE
ASTROPHYSICIEN, DIRECTEUR DE RECHERCHE ÉMÉRITE AU CNRS
PRÉSIDENT DE LA COMMISSION NATIONALE FRANÇAISE POUR L’UNESCO
Les deux projets du 21e siècle concernant l’exploration directe par l’Homme de notre environnement spatial sont d’une part, le retour des cosmonautes sur la Lune, un voyage long d’environ 400 000
km, et d’autre part une mission consistant en un vol habité vers la planète Mars, au moment où cette dernière et la Terre seront à la distance la plus faible (55 millions de km, malgré
tout !). De fait, ces deux projets ne sont pas indépendants l’un de l’autre, puisque ce deuxième voyage devrait normalement partir depuis la Lune. Dans tous les cas, même si l’aventure la
plus ambitieuse est repoussée à un futur lointain, on peut raisonnablement espérer qu’au cours de ce siècle, l’on établira une ou plusieurs bases sur la Lune qui sera (seront) un ou des lieux de
vie temporaires ou permanents.
Le projet de sculpture, « L’Espace, c’est nous » d’Anilore Banon, s’inscrit dans ce dessein : dès son origine, l’humanité a conjugué ses activités de vie ordinaires avec des
expressions artistiques, comme les sites de Lascaux et de la Ferme Chauvet, par exemple, en témoignent. Cette (ces) base(s) lunaire(s) future(s) a (ont) naturellement vocation à inspirer peintres
et sculpteurs qui pourraient souhaiter ainsi participer via leurs œuvres à cette nouvelle grande aventure humaine. Après avoir contribué à renforcer le caractère mémoriel des plages normandes du
débarquement allié de 1944, Anilore Banon se propose donc d’accompagner la future mise en place des bases lunaires par une sculpture de grande dimension, capable de voyager dans l’une des fusées
qui transporteront les cosmonautes et de se déployer dès qu’elle parviendra sur le site choisi. Les grands personnages de « L’Espace, c’est nous ! » joueront donc, là bas sur la
Lune, le même rôle que les bisons et les mammouths dessinés au fond des grottes préhistoriques.
De plus, Anilore Banon souhaite, grâce à son œuvre, faire partager par tous, en particulier par les plus jeunes cette nouvelle épopée, d’abord en exposant sa sculpture avant son départ dans de
grands musées, d’autre part en invitant les visiteurs à déposer et enregistrer les traces de leurs mains sur celle-ci. L’espace, en effet, ne commence pas à la Lune : nous vivons sur une
planète, la Terre, qui vogue dans l’espace en tournant autour du Soleil en un an, le Soleil effectuant lui-même un vaste voyage autour du centre de la Voie Lactée en 200 millions d’années et
notre Galaxie se rapprochant ou s’éloignant constamment de ses semblables. Par ailleurs, nous sommes faits de la même matière que celle du Soleil et des autres étoiles qui brillent dans le ciel.
Autant de raisons pour proclamer que « l’Espace, c’est nous ! » et qui donnent tout son sens à cet ambitieux et magnifique projet.